Главная страница «Первого сентября»Главная страница журнала «Французский язык»Содержание №9/2008

Univers du français

Mariam MAGOMEDOVA

La renaissance de la mode russe

« La mode, c’est le miroir
de l’histoire. »

Louis XIV

img1

Le roi Soleil avait raison d’affirmer que la mode est le miroir de l’histoire. Les vêtements et les accessoires sont les témoins de la vie de la société à telle ou telle époque. Notre manière de s’habiller parlera de nous, de notre mode de vie à nos descendants. Le seul fait que la mode existe ou pas est déjà en soi une caractéristique éloquente de l’époque.

La Russie est un pays à l’histoire particulièrement mouvementée. Au XXe siècle, par exemple, elle a connu la Première Guerre mondiale, deux révolutions, la Guerre civile, la construction de la société socialiste, la Deuxième Guerre mondiale, la restauration du pays et la stagnation, la Perestroïka, la chute de l’URSS, la disparition du système soviétique et sa renaissance en tant qu’État. La seule énumération des événements fait penser à la disparition de classes et de couches entières de la société, au changement des modes de vie et de la mode.

La mode russe a disparu après la révolution de 1917, cédant la place à la confection fabriquée à la chaîne. La pénurie, le manque, voir l’absence, de marchandises dans les magasins étaient caractéristiques de l’époque de la construction du communisme. Mais tout de même, on ne peut pas affirmer que la mode russe était morte.

img2

Il y a eu d’abord l’influence des vêtements rapportés de l’Europe après la victoire de la Deuxième Guerre mondiale. Un triste témoignage qu’on rencontre dans les livres sur l’histoire de la mode : les femmes soviétiques ignoraient ce qu’était le linge de qualité et se promenaient dans les rues en... chemises de nuit de soie, rapportées par leurs maris de l’Allemagne vaincue.

Après la visite de Mao Tse Toung en URSS en 1949, le style oriental apparaît dans les vêtements des Soviétiques grâce à l’influence des marchandises chinoises qui se vendaient dans les magasins dans les années 1950. En 1957, après le Festival mondial des étudiants et de la jeunesse, se développe le marché noir où l’on pouvait acheter à des prix exorbitants des vêtements rapportés d’Occident. Et puis, il y a eu un événement révolutionnaire : en 1959, la première visite en URSS de la Maison de Haute Couture Dior qui a montré sa collection à Moscou. (Le défilé précédent avait eu lieu à Pétersbourg en 1911).

Les années 1960-1980 sont marquées par le phénomène de Slava Zaïtzev. Il termine ses études universitaires en 1962, et dès 1965 Pierre Cardin et Guy Laroche l’appellent « Égal parmi les égaux », puis la presse française l’a baptisé « Dior rouge ». Travaillant à la Maison de mode, il met fin à la pratique de la création collective des vêtements. Il est le premier couturier russe à ouvrir à Moscou sa Maison de mode, puis à créer le théâtre de la mode, il est le premier à avoir lancé son parfum. En 1988, il est invité à montrer sa collection à Paris et se voit attribuer la médaille d’or de la ville de Paris, l’année suivante il est nommé l’Homme de l’année dans le domaine de la mode.

Au milieu des années 1990, après la Perestroïka, la mode étrangère envahit la Russie. Le mot « mode » devient très usité dans le vocabulaire courant. Les plus grandes Maisons de Haute Couture de l’Europe et, un peu plus tard, des USA et du Japon ouvrent à Moscou. Les vêtements et les accessoires de mode, qui étaient inabordables pour les Russes pendant des dizaines d’années, deviennent cultes. « La mode à la mode » fait paraître non seulement les versions russes des magazines comme Cosmopolitan, Vogue, L’Officiel, Harper’s Bazaar, Elle, Gala, mais aussi des magazines russes, orientés vers la mode.

img3Les marques populaires comme Mango, Morgan, Mexx, Esprit, Promod, Naf-Naf apparaissent alors en Russie.

Les nouvelles possibilités qui se sont ouvertes avec la chute du rideau de fer ont prouvé que le potentiel créatif de la mode russe est très haut.

C’est en 1991, que Valentin Youdachkine, qui a débuté à la fin des années 1980, a fondé sa société éponyme et a créé sa première collection de haute couture Faberger qui, après son défilé à Paris, l’a rendu célèbre. Depuis il participe chaque année à la semaine de la Haute Couture à Paris et il est devenu l’ami et l’élève de Pierre Cardin. Youdachkine ouvre sa Maison de Haute Couture, crée des collections de prêt-à-porter, lance ses parfums. Il travaille pour le théâtre et habille les stars russes (notamment, Alla Pougatcheva est sa cliente fidèle) et les hommes politiques.

Le 19 juillet 2007, il s’est vu attribuer une haute décoration française : les insignes de Chevalier de l’Ordre des Arts et des Lettres. En lui remettant la décoration, l’ambassadeur de France en Russie a dit qu’« Européen de vocation et de cœur, Valentine Youdachkine puisait son inspiration dans l‘héritage historique et culturel de la Russie et de l’Europe ».

Voici quelques titres des collections du maître : « Catherine la Grande », « Elisabeth I », « Le voyage de Moscou à Saint-Pétersbourg », « Impressionnistes », « Anna Karénine » et « Style Art Déco ». La diversité de sa palette est admirable.

img4La mode russe offre aujourd’hui un éventail de noms de jeunes créateurs. La plupart d’entre eux ont commencé leur carrière en Occident. L’un des noms russes les plus connus en Europe est Denis Simachev. Ce couturier a fait une carrière éclatante en Angleterre, utilisant les symboles soviétiques, qui étaient à la mode à cette époque-là.

D’autres noms connus à signaler sont ceux d’Igor Tchapurine, Alena Akhmadoullina, Macha Tsygal. Les dernières années sont caractérisées par le développement et la propagation des marques accessibles par leur coût des designers russes comme Soultanna Frantsouzova et Evguenia Ostrovskaïa.

L’association « Rousski Silhouette », avec Tatiana Mikhalkova à sa tête, a joué un grand rôle dans le développement de la mode russe. Grâce à cette association, les couturiers russes doués ont la possibilité de devenir célèbres.

Il serait intéressant de mentionner le point de vue de l’historien de la mode Alexandre Vassiliev. Dans une de ses interview, en répondant à la question : « Que pensez-vous de la mode russe ? », il a dit : « Elle me réjouit. D’une part, la mode russe est demandée dans le monde. J’appelle ça “la mode à la russe”. Les motifs nationaux russes apparaissent dans les collections des couturiers étrangers qui viennent en Russie pour étudier son histoire. D’autre part l’apparition de la nouvelle vague des jeunes couturiers doués de talent ne peut que me réjouir. Enfin c’est la naissance du style russe qui ne reproduit ni les tendances occidentales ni les tendances orientales. Il faut que la Russie qui depuis l’époque de Pierre le Grand s’habille à l’européenne crée son propre style prenant en considération, notamment, les particularités du climat ».

img5Quant à la vie quotidienne, la période post-soviétique est caractérisée par une grande quantité de nouvelles tendances. Une pointe de glamour et de chic, étrangère au prêt-à-porter soviétique, est apportée dans la vie des femmes russes.

Les mass media font la propagande du bon goût, apprennent aux femmes de tout âge à chercher leur style. Deux émissions télévisées les plus populaires de ce genre sont : « Enlevez-le tout de suite ! » et « Le verdict de la mode ». Cette dernière passe sur la première chaîne tous les jours, sauf samedi et dimanche. Parmi les animateurs de l’émission il y a Slava Zaïtzev et Evelina Khromtchenko, rédactrice en chef du magazine L’Officiel.

L’opinion publique est plus tolérante quant au choix personnel des vêtements. L’uniforme scolaire n’est plus obligatoire.

Quelle est l’attitude de mes copains sur la mode ?

61,1 % déclarent que la mode, c’est important pour eux.

« Bien sûr, la mode c’est important pour moi parce qu’elle montre l’exemple du style moderne, elle nous aide à choisir notre propre style. »

img6« Pour moi, comme pour chaque fille, la mode est importante. C’est agréable de se plaire et de plaire aux autres, voilà pourquoi tout le monde veut suivre la mode. » En même temps 11 % des jeunes de ce groupe soulignent qu’ils ne veulent pas suivre la mode aveuglément.

« La mode c’est important, mais mon propre style est plus important. »

Les 30 % qui disent ne pas s’intéresser à la mode avancent comme arguments : « Je ne peux pas dire que je ne m’intéresse pas du tout à la mode, je parcours de temps en temps les articles à ce sujet dans des revues pour les jeunes. Mais je pense que j’ai déjà trouvé mon propre style. Mon look c’est mon choix. »

« Non, la mode n’est pas importante pour moi et je ne veux pas la suivre. Dans les magasins je choisis seulement des vêtements qui me plaisent. Mais ce que j’aime le plus, c’est quand les gens me trouvent à la mode. »

Leurs sources d’information sur la mode sont les magazines, les émissions télévisées, les magasins, la rue et les copains.

La majorité croit que la mode russe n’existe pas, que les couturiers russes suivent la mode européenne. Seulement 15 % sont de l’avis que « La mode russe se développe bien. » « La mode russe a son chic, quelque chose de particulier qu’on ne verra jamais chez les designers étrangers. Nos couturiers sont connus dans le monde entier. Les jeunes surprennent la société par des collections extraordinaires. »

« Je pense que dans le futur la mode russe connaîtra gloire et influence partout dans le monde, surtout en Europe, mais pour cela il faut travailler beaucoup. »

TopList