Главная страница «Первого сентября»Главная страница журнала «Французский язык»Содержание №15/2008

Les Routes de l’Histoire

Les poilus

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Les dix-huit premiers mois de la guerre ont été extrêmement difficiles. La cause en était la conviction du haut commandement de venir à bout rapidement par une guerre courte, et peu d’attention portée aux simples soldats par des officiers supérieurs persuadés que la défaite était surtout due à la mauvaise volonté des troupes. D’où une avalanche de punitions et d’exécutions.

Ce qui commence comme une guerre courte, s’enfonce dans un immobilisme boueux ponctué d’attaques aussi meurtrières que vaines. L’énormité des pertes, les souffrances de la vie quotidienne au front et la peur révèlent aux millions de combattants des réalités brutales qu’ils ne soupçonnaient pas.

Le journal d’un soldat

Maurice Maréchal a 22 ans en 1914. Après la guerre, il deviendra l’un des plus grands violoncellistes du monde et l’un des maîtres de Mstislav Rostropovitch. Entre 1914 et 1919, il est agent de liaison. En mai 1915, un autre poilu lui fabriquera un violoncelle avec les morceaux d’une porte et d’une caisse de munitions. Ce violoncelle signé par les généraux Foch, Pétain, Mangin et Gouraud est aujourd’hui conservé à Paris, à la Cité de la Musique.

Maurice Maréchal

Mobilisation générale au jour le jour !

(extraits)

Dimanche, 2 août 1914.

Premier jour de la mobilisation générale. Je me sens faible, j’ai besoin de manger un peu et de dormir. Pourtant, nous sommes partis hier à 7 heures du matin de Rouen. Nous avons roulé 18 heures de suite et avons marché depuis une heure du matin jusqu’à 6 heures… Que d’impressions depuis hier, et d’abord, petite mère, merci, tu as été sublime de courage samedi soir. Je suis fier d’être ton fils. Hier, durant tout le trajet, les populations pressées aux gares n’ont cessé de nous acclamer, les femmes envoyant des baisers, les hommes reprenant avec nous La Marseillaise et Le Chant de départ.

Oh, que m’est-il réservé ? J’aurais dû rester, travailler mon violoncelle pour vous, pour petite mère, déjà malade ! Pardon, Maman ! Que je suis coupable ! Et pourtant, il faut marcher. Tant pis, je suis parti, ça y est, je ne peux plus revenir ! Et comme je désire pourtant, en ce moment, une heure de calme repos, chez nous, sous le toit familial, près de mes êtres chers… Allons, ne nous amollissons pas ! Allons, soyons gai, courageux, confiant !

***

La vie que nous menons nous rend durs, extrêmement durs, elle nous ramène à une mentalité primitive, sauvage, où l’instinct domine avec violence…

Il m’est arrivé, à moi qui n’ai jamais appliqué un coup de poing à quiconque de prendre plaisir à tuer…

***

Nous sommes dans les tranchées qui contiennent trente centimètres d’eau. Depuis cinq mois, nous n’avons pas encore quitté les pantalons, et depuis quinze jours nous n’avons pas encore quitté les chaussures.

***

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Pendant cette marche en avant, l’adjudant Pesnel veut obliger des soldats couchés à se lever pour avancer. D’un coup de pied, il pense être obéi, mais aucun sursaut ne répond. Il se baisse et s’aperçoit que ce ne sont plus que des cadavres. Ces soldats ont été tués pendant qu’ils tiraient à plat ventre et sont restés tels. Cela nous impressionne tout de même un peu...

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