Главная страница «Первого сентября»Главная страница журнала «Французский язык»Содержание №18/2008

Arts et culture

Lucien Ginzburg, le timide

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Joseph et Olga Ginzburg

Parents

Ses parents, Joseph Ginzburg et Olga Besman, sont nés à Odessa. Ils quittent la Russie, après la Révolution d’Octobre. Joseph devient pianiste de bar à Istanbul et épouse Olga en 1918. Le jeune couple, muni de faux papiers fabriqués à Istanbul, débarque en France en 1921 afin de rejoindre le frère d’Olga, installé à Paris. Joseph est premier prix de piano au conservatoire de musique et peintre. Arrivé à Paris, il abandonne la peinture et la musique classique (il aime Chopin, Stravinsky, Gershwin). Pour gagner sa vie, il joue de la musique légère qu’il déteste, dans les bars et les cabarets de Pigalle1. Leur premier enfant, Marcel, meurt à l’âge de seize mois. Une fille, Jacqueline, naît en 1926. Puis, le 2 avril 1928 Lucien Ginzburg (Lulu) pousse son premier cri quelques minutes après sa jumelle Liliane.

Enfance

Lucien n’est pas beau et n’a rien d’exceptionnel. Son enfance est tout à fait ordinaire et grise : celle d’un fils de migrants sans sou. Seul garçon de la famille, Lucien grandit avec sévérité. Il apprend le piano avec son père, dont la discipline est de fer. À la première faute, une gifle ou un coup de ceinture : Lucien n’a pas le droit de massacrer Beethoven ou Mozart en jouant n’importe comment. Lucien hurle. La mère détourne les yeux, les sœurs se bouchent les oreilles. Le garçon se met au piano, suit les traces de son père et se forme au classique, puis au jazz, par l’intermédiaire des œuvres de George Gershwin. Le père exige de son fils une parfaite éducation scolaire et musicale.

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Liliane et Lulu

La famille occupe un petit appartement de trois pièces, rue Chaptal, dans le IXe arrondissement, à cinq minutes à pied de Montmartre. Quartier touristique et populaire, décor idéal pour mélodrames d’entre-deux-guerres : filles de joie et voyous du boulevard Rochechouart, fêtards bruyants se promenant sur la Butte, marchands de légumes et de fruits, cloches de Notre-Dame-de-Lorette, bistrots inquiétants et mal fréquentés, femmes du monde sortant du théâtre, femmes du demi-monde2 mystérieuses et pressées, chanteurs de rue, chanteuses de trottoir, linge qui sèche aux fenêtres, école municipale, boulanger, crémier.

Lucien s’ennuie à l’école, s’ennuie à faire du piano, s’ennuie à apprendre le dessin. Peu à peu, il apprend à faire tout cela « comme si ». Il se montre cependant très sage et attentif aux cours (pourvu qu’on le laisse en paix). Il est tout ce qu’il y a de plus discret, poli, réservé, obéissant. Il est chétif et maladif : on le soigne au chaud, cataplasmes3 et sirops.



1 Quartier du nord de Paris, célèbre pour ses cabarets, notamment l’illustre Moulin-Rouge.

2 Au XIXe siècle, le terme de demi-mondaine désignait les femmes entretenues par de riches Parisiens.

3 Cataplasme (m) – préparation médicamenteuse de la consistance d’une bouillie épaisse qui, étalée entre deux linges, s’applique généralement chaude sur la partie du corps à soigner.

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