Главная страница «Первого сентября»Главная страница журнала «Французский язык»Содержание №15/2008

Les Routes de l’Histoire

1916. Le Grand Massacre

L’année 1916 voit deux formidables offensives sur le front occidental : celle des Allemands à Verdun, et celle des Franco-Britanniques sur la Somme. Mais les seuls succès remportés de part et d’autre le sont sur le plan défensif.

Espionnage

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Mata Hari

Dans tous les pays d’Europe, sur le front comme à l’arrière, les espions sont nombreux et bien organisés. L’espionnage anglais est actif à la fois en Belgique et au Danemark, où ses agents sont dissimulés dans la population civile. Les Français et les Russes ne sont pas en reste. Le 2ème Bureau français dispose des renseignements fournis par les Alsaciens-Lorrains de la zone occupée, et par les Français des départements envahis. Des deux côtés, la justice militaire traite rudement les agents secrets arrêtés. Jugés, ils sont très vite exécutés. Les femmes participent aux activités d’espionnage et sont condamnées comme les hommes : l’espionne Mata Hari est fusillée par les Français. Les Allemands capturent la Belge Martha Mac Kenna qui travaille pour les Alliés et lui réservent le même sort.




Mata Hari, l’espionne au destin tourmenté et mystérieux

« Mais je vous prie de me croire : jamais je ne me suis livrée
à une activité d’espionnage contre la France. »

Mata Hari

Une reine de la Belle Époque

Margaret Zelle est née à Leeuwarden (Pays-Bas). Alors qu’elle n’est âgée que de 6 ans, sa famille déménage pour Leiden. La jeune fille étudie à l’école Normale de Leiden afin de devenir enseignante. À l’âge de 18 ans, elle épouse un officier de la marine, nommé MacLeod de dix-neuf ans son aîné, alcoolique et violent. Ils vivent aux Indes néerlandaises et ont deux enfants. Le couple rentre en Europe en 1903. Margaret se sépare de son officier et pour survivre, se fait embaucher dans un cirque.

Mystérieuse, provocante, envoûtante...

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Au printemps 1905, elle fait ses débuts comme danseuse sous les apparences d’une princesse javanaise, dénommée « Mata Hari » (« L’œil de l’Aurore » en malais) au Musée des études orientales, plus connu sous le nom de Musée Guimet, qui abrite une salle de spectacle privée. La représentation consiste en un tableau animé représentant le dieu hindou Shiva aux six bras recevant l’hommage exalté d’une pléiade de princesses. Celles-ci sont emmenées par... Mata Hari habillée d’un collant couleur chair et ruisselante d’or et de jade. La salle est sous le charme de Mata Hari, et une spectatrice, l’écrivain Colette, note en experte : « Elle ne dansait guère mais elle savait se dévêtir progressivement et mouvoir un long corps mince et fier ». Le spectacle connaît le succès et la troupe se produit bientôt à Madrid, Monté Carlo, Berlin, La Haye, Vienne et même Le Caire. La jeune et troublante artiste collectionne les protecteurs haut placés, tout en créant autour de sa personne une légende : « Elle serait née à Java où les prêtres de Shiva l’ont initiée aux secrets de son culte et de ses danses. Son père était un riche industriel. Son mari, un officier supérieur dont elle est séparée, est jaloux comme un tigre », fait-elle comprendre à son entourage fasciné. Personnalité flamboyante, elle s’invente ainsi un personnage et une histoire.

Après l’entrée en guerre des puissances européennes, en août 1914, Mata Hari, qui parle plusieurs langues et vient d’un pays neutre, se permet de voyager librement à travers l’Europe. Symbole de la danseuse orientale sensuelle, elle devient courtisane dans les capitales européennes.

En 1916, elle est approchée par le capitaine Ladoux, chef des services du contre-espionnage français, qui l’incite à mettre ses relations internationales au service de la France. Elle accepte contre promesse d’une somme d’un million de francs … qui n’a jamais été versée. À Paris, elle mène grand train au Grand Hôtel où les officiers abondent. Les jeunes pilotes de chasse jouissent en particulier d’un prestige irrésistible. C’est ainsi, que la Belle tombe amoureuse, fin 1916, d’un capitaine russe au service de la France, dénommé Vadim Maslov, fils d’amiral. Il a 21 ans. Le jeune officier est blessé. Se lançant à sa poursuite, elle accepte d’espionner le prince héritier allemand qui est son amant.

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Pour éviter les combats, elle rejoint les Pays-Bas. Courtisée par de nombreux officiers alliés, elle est néanmoins interrogée par les services britanniques et reconnaît son appartenance aux services secrets français. On ne sait pas si elle a menti à cette occasion, croyant que cette histoire la rendrait plus intrigante, ou si les services français se servaient effectivement d’elle sans le reconnaître.

En janvier 1917, l’attaché militaire allemand à Madrid, transmet un message à Berlin, décrivant les activités d’un espion « H-21 ». Les services secrets français identifient H-21 comme étant Mata Hari. Aussi étrange que cela puisse paraître, les Allemands cryptent le message avec un code qu’ils savent être connu des Français, laissant les historiens penser que le but du message était que, si elle travaillait effectivement pour les Français, ceux-ci pourraient démasquer sa double identité et la neutraliser.

Mata Hari fait alors la folie de rentrer en France pour rejoindre son bel officier russe. Arrivée à Paris le 4 janvier 1917, elle est arrêtée le 13 février. Le contre-espionnage effectue une perquisition dans sa chambre de l’hôtel Palace sur les Champs-Élysées On ne trouve pas de preuve incontestable. On la soumet cependant à des interrogatoires humiliants à la prison Saint-Lazare. Et la danseuse admet avoir été payée par des officiers allemands. « Pour prix de mes faveurs », précise-elle. Pour des « renseignements », selon ses juges, sans préciser lesquels.

Procès et mort

Accusée d’espionnage au profit de l’Allemagne, Mata Hari passe du statut d’idole à celui de coupable. Figure fascinante, elle ne pouvait que susciter des jalousies. Elle est convoquée à huis clos le 24 juillet 1917 devant le Conseil militaire, au Palais de justice de Paris. Le procès ne dure qu’une journée sans apporter de nouveaux éléments. À son immense désespoir, Mata Hari entend son cher lieutenant, Vadim Maslov, appelé à la barre, la qualifier d’aventurière.

Condamnée à mort, elle est fusillée le 15 octobre 1917, à l’âge de 41 ans, dans les fossés de la forteresse de Vincennes. Selon la légende, elle aurait refusé le bandeau qu’on lui proposait et aurait lancé un dernier baiser aux soldats de son peloton d’exécution.

Renaissance d’un mythe

Près de 100 ans plus tard, les archives du procès n’ont toujours pas été rendues publiques. Mata Hari a-t-elle été manipulée par la France et l’Allemagne ? Était-elle véritablement coupable ? Le dossier, a-t-il été falsifié par les services d’espionnage français à des fins « patriotiques » ? Mata Hari, est-elle devenue aussi la victime de la morale de l’époque condamnant la liberté des mœurs, victime d’un complot, victime de sa légende ?

Quoi qu’il en soit, le personnage est entré dans la légende et Greta Garbo, Marlène Dietrich, Jeanne Moreau, Sylvia Kristel et Maruschka Detmers lui ont depuis prêté leur personnalité à la scène, à l’écran ou à la télévision.

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