Главная страница «Первого сентября»Главная страница журнала «Французский язык»Содержание №16/2008

Arts et culture

Marina OURINOVA

Poèmes en prose des poètes connus, peu connus et méconnus

Max Jacob (1876-1944)

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Max Jacob est né en Bretagne. Il quitte sa ville natale en 1894 pour suivre l’enseignement supérieur à Paris. Il se consacre très rapidement à l’écriture et côtoie Picasso et Apollinaire. En 1909, il dit avoir vu Dieu apparaître sur le mur de sa chambre et dès 1915, il se convertit au catholicisme. En 1917, Max Jacob publie Le Cornet à dés et rencontre un véritable succès. Ce livre va ouvrir la porte à la recherche d’un style littéraire nouveau. Il est entouré par des écrivains et des artistes, tels que Modigliani, Kisling, Cocteau. D’après les témoignages de ses contemporains il était un homme à la fois bavard, solitaire, mystique et infatigable. Max Jacob a été arrêté par la Gestapo et est mort d’une pneumonie au camp de Drancy.

On le connaît en Russie mais certains de ses poèmes en proses sont peu connus, c’est pourquoi j’ai décidé de traduire quelques-uns.

Les Vrais miracles

Le bon vieux curé ! Après qu’il nous eut quttés, nous le vîmes s’envoler au-dessus du lac comme une chauve-souris. Il était absorbé dans ses pensées pour ne pas même s’apercevoir du miracle. Le bas de sa sutane était mouillé, il s’en étonna.

Настоящие чудеса

Милый старик кюре! Когда уже он нас покинул, мы его вдруг увидали – порхал он над озером вроде летучей мыши. И был он так погружен в свои мысли, что даже не заметил чуда. Подол же его сутаны замочился, и этим он был удивлен.

Petit poème

Je me souviens de ma chambre d’enfant. La mousseline des rideaux sur la vitre était griffonnée de passementeries blanches, je m’efforçais d’y retrouver l’alphabet et quand je tenais les lettres, je les transformais en dessins que j’imaginais : H, un homme assis ; B, l’arche d’un pont sur un fleuve. Il y avait dans la chambre plusieurs coffres et des fleurs ouvertes sculptées légèrement sur le bois. Mais ce que je préférais, c’était deux boules de pilastres qu’on apercevait derrière les rideaux et que je considérais comme des têtes de pantins avec lesquels il était défendu de jouer.

Маленькая поэма

Я вспоминаю свою детскую комнату. Муслиновая занавеска на окне была вся покрыта узорами из белого басона. Я пытался на ней отыскать алфавит, и когда я узнавал буквы, я их тотчас преображал в рисунки. Так, H – это сидящий мужчина, B – арка моста над ручьем. В комнате было несколько сундуков, а на них – раскрытые лепестки роз, изящно вырезанные по дереву. Но самым заманчивым для меня были пилястры шаров за занавесками, я принимал их за головки кукол, с которыми мне запрещали играть.

Pierre Reverdy (1889-1960)

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Pierre Reverdy naît à Narbonne. Après que son père fut ruiné en 1907, le jeune homme vient à Paris pour chercher du travail. Il s’installe alors à Monmartre et fait la connaissance de Max Jacob, Appolinaire, Matisse et Picasso.

En 1916, il fonda la revue Nord-Sud où se retrouvent des poètes modernes.

Puis comme Max Jacob il se convertit au catholicisme et part à Solesme où il vécut en grande pauvreté jusqu’à sa mort.

Pierre Reverdy est assez connu chez nous grâce à de nombreuses traductions.

Saltimbanques

Au milieu de cet attroupement il y a avec un enfant qui danse un homme qui soulève des poids. Ses bras tatoués de bleu prennent le ciel à temoin de leur force inutile.

L’enfant danse, léger, dans un maillot trop grand, plus léger que boules où il se tient en équilibre. Et quand il tend son escacelle, personne ne donne. Personne ne donne de peur de la remplir d’un poids trop lourd.

Il est si maigre.

Бродячие акробаты

Посреди этой толпы мальчик танцует, рядом с ним силач поднимает гири. Руки мужчины в татуировках само небо берут в свидетели своей бесполезной силы.

Ребенок танцует – о, какой он легкий в своем не по росту трико! Он даже легче шаров, на которых он балансирует. А потом он протягивает свой кошель, но никто не кладет туда денег. Никто не дает – боятся, что он станет как гиря.

А ребенок – такой худой!

Guy Lévis Mano (1904-1980)

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Guy Lévis Mano a été typographe, poète, traducteur et éditeur de poésie. Toujours soucieux de faire découvrir des auteurs méconnus il publie les poèmes par-delà le temps et l’espace. De l’Antiquité à l’Amérique du Sud d’aujourd’hui, germaniques, anglo-saxons, africains et russes. Dès ses débuts il publie dans ses premières revues parmi d’autres poètes Mandelstam, Yessenine, Pasternak, Akhmatova, Maïakovski. D’après l’opinion de ses amis, il était un incomparable typographe-éditeur. Ce fou de typograhie, ce fou de poésie, il a publié tout ce qui compte. On peut dire qu’il a consacré sa vie à l’édition de la poésie.

Il ne fit pas ce métier seulement pendant six ans, de 1939 à 1945, c’était son expérience de guerre suivie par celle de captivité. À son retour en 1945, un des premiers textes que composa et édita Guy Lévis Mano fut le poème de Paul Éluard Liberté très célèbre maintenant.

Malheureusement comme poète Guy Lévis Mano est presque oublié en France .

Peupler la prison

Il était le juge. Les cinq geôliers amenèrent le prisonnier. Le juge regarda les yeux affamés du prisonnier. Il y vit des fleuves, des prairies, des coteaux, quelques fleurs, et aussi des oiseaux qui les parsemaient. Puis il regarda les yeux gris des geôliers. Il n’y vit que des judas, des serrures séparées de leur clefs, et des murailles. Le juge parla : « Que le prisonnier s’en aille récupérer son fleuve, sa plaine et ses oiseaux. Il suffit de geôliers pour peupler la prison ».

Заселить темницу

Был некогда судья. Пять стражей узника к нему ввели. Судья взглянул в голодные глаза несчастного. В них он увидел реки, дикие луга, цветы и птиц, усеявших долину. Потом вгляделся он в глаза стальные стражей. В них он увидел лишь дверной глазок, засовы вечные и мрачную стену. Тогда судья сказал: «Пусть узник выйдет и вновь вернется к своим полям, реке и птицам. Вполне нам хватит стражей, чтоб ими заселить темницу».

Henri Michaux (1899-1984)

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Dans la famille de bourgeois de Namur où Henri Michaux naît en 1899, il est « l’insoumis », le révolté que rien ne fait plier. Après avoir été tenté par la médecine, il embarque comme matelot pour l’Amérique, rentre en Belgique une année plus tard et enfin s’installe à Paris en 1924.

Il écrit beaucoup dans la période d’avant-guerre. Mais en même temps il commence à peindre et après 1948 il écrit de moins en moins et peint davantage. Il faut dire que dans le domaine de la peinture il poursuit également des recherches de première importance.

Naturalisé français en 1955, il meurt à Paris à l’âge de 85 ans.

« Poète surréaliste, mais ne devant rien qu’à lui-même, estime Pierre Seghers, Henri Michaux est un solitaire, un cœur greffé... »

Il se distingue par une virtuosité verbale hors de pair, il est un jongleur de mots, son œuvre peut être présentée comme une insurrection permanente contre tout ce qui peut ressembler à une convention. Parmi ses armes majeures, l’humour, le refus de toute censure.

Par cette identité d’un révolté il ressemble bien à Daniil Harms, poète d’avant-garde des années 1920-1930 en Russie.

Le Vent

Le vent essaie d’écarter les vagues de la mer. Mais les vagues tiennent à la mer, n’est-ce pas évident, et le vent tient à souffler, même devenu tempête ou bourrasque il n’y tient pas. Il tend aveuglement, en fou et maniaque, vers un endroit de parfait calme, de bonace, ou il sera enfin tranquille, tranquille.

Comme les vagues de la mer lui sont indifférentes ! Qu’elles soient sur la mer ou sur un clocher, ou dans une roue dentée ou sur la lame d’un couteau, peu lui chaut . Il va vers un endroit de quiétude et de paix où il cesse enfin d’être vent.

Mais son cauchemar dure depuis longtemps.

Ветер

Ветер пытается отодвинуть волны с моря. Но волны стремятся к морю, это так очевидно, так же как ветер любит дуть… нет, даже став ураганом и шквалом, вовсе не этого он хочет. Стремится он слепо и бешено, словно маньяк иль безумец, к месту покоя, полному штилю, где, наконец, он станет тихим-тихим.

О, как волны моря ему безразличны! Где б они ни были: в пучине морской или на колокольне, зубчатом колесе или лезвии ножа, ему все равно, ему не до них. Он идет к месту покоя и мира, где он, наконец, перестанет быть ветром.

Но его кошмар все длится – и уже давно.

(à suivre)

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