Главная страница «Первого сентября»Главная страница журнала «Французский язык»Содержание №23/2008

Arts et culture

Guy de MAUPASSANT

La Légende du Mont-Saint-Michel

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Je l’avais vu d’abord de Cancale, ce château de fées planté dans la mer. Je l’avais vu confusément, ombre grise dressée sur le ciel brumeux.

Je le revis d’Avranches, au soleil couchant. L’immensité des sables était rouge, l’horizon était rouge, toute la baie démesurée était rouge, seule, l’abbaye escarpée, poussée là-bas, loin de la terre, comme un manoir fantastique, stupéfiante comme un palais de rêve, invraisemblablement étrange et belle, restait presque noire dans les pourpres de jour mourant.

J’allai vers elle le lendemain dès l’aube à travers les sables, l’œil tendu sur ce bijou monstrueux, grand comme une montagne, ciselé comme un camée, et vaporeux comme une mousseline. Plus j’approchais, plus je me sentais soulevé d’admiration, car rien au monde peut-être n’est plus étonnant et plus parfait.

Et j’errai, surpris comme si j’avais découvert l’habitation d’un dieu à travers ces salles portées par des colonnes légères ou pesantes, à travers ces couloirs percés à jour, levant mes yeux émerveillés sur ces clochetons qui semblent des fusées parties vers le ciel et sur tout cet emmêlement incroyable de tourelles, de gargouilles, d’ornements sveltes et charmants, feu d’artifice de pierre, dentelle de granit, chef-d’œuvre d’architecture colossale et délicate.

Comme je restais en extase, un paysan bas-normand m’aborda et me raconta l’histoire de la grande querelle de saint Michel avec le diable…

Le paysan raconte l’histoire de la querelle qui se déroule peu à peu et aboutit à la fin à une poursuite du diable par le saint à travers l’abbaye.

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Ils couraient par les salles basses, tournant autour des piliers, montaient les escaliers aériens, galopaient le long des corniches, sautaient de gargouille en gargouille. Le pauvre démon fuyait et se trouva enfin sur la dernière terrasse, tout en haut, d’où l’on découvre la baie immense avec ses villes lointaines, ses sables et ses pâturages. Il ne pouvait échapper plus longtemps, et le saint, lui jetant dans le dos un coup de pied furieux, le lança comme une balle à travers l’espace.

Il fila dans le ciel ainsi qu’un javelot, et s’en vint tomber lourdement, devant la ville de Mortain. Les cornes de son front et les griffes de ses membres entrèrent profondément dans le rocher, qui garde pour l’éternité les traces de cette chute de Satan.


Fiche pédagogique

Tatiana JELEZNIAKOVA

VOCABULAIRE

confusément – неясно, смутно

brumeux – туманный

baie (f) – бухта

démesurée – огромная, необъятная

escarpé – крутой, обрывистый

manoir (m) – небольшой замок, усадьба, поместье

stupéfiant – поразительный, удивительный

ciselé – чеканный, резной

camée (m) – камея (украшение из камня с художественной резьбой)

vaporeux – воздушный, легкий, парообразный

mousseline (f) – муслин (легкая, тонкая ткань), кисея

errer – бродить

pesant – тяжелый, тяжеловесный

percé à jour – ажурный (резной, с дырочками, словно ажур)

fusée (f) – ракета

emmêlement (m) – путаница

svelte – стройный

feu d’artifice – фейерверк

dentelle (f) – кружево

querelle (f) – ссора

poursuite (f) – погоня, преследование

pilier (m) – колонна

fuir – убегать, спасаться бегством

pâturage (m) – пастбище

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échapper – ускользнуть, убежать, скрыться

javelot (m) – копье, дротик

membres (m) – конечности (руки, ноги)

rocher (m) – скала

éternité (f) – вечность

chute (f) – падение


QUESTIONS ET DEVOIRS

  1. Dans ce texte on rencontre des noms géographiques (Cancale, Avranches, Mortain, la baie du Mont-Saint-Michel). Trouvez-les sur la carte géographique. Cherchez-en des informations historiques et culturelles.
  2. Dans la première partie de la nouvelle, Guy de Maupassant décrit l’abbaye du Mont Saint Michel. Cette description comprend des éléments différents. Lesquels ?
  3. Parlons du paysage dans la première partie du texte. Trouvez toutes les expressions du paysage dans ce fragment.
  4. Parlons des couleurs qui sont présentes dans la description. Comment est organisé l’espace ?
  5. Quelles sont les formes architecturales que Maupassant met en relief ?
  6. Comment les formes de l’espace se conjuguent avec celles de l’architecture ?
  7. Trouvons dans le texte des procédés stylistiques : épithètes, comparaisons et métaphores; énumérations et gradations ; parallèles et répétitions; juxtapositions et oppositions.
  8. Et, bien sûr, n’oublions pas les images que l’auteur crée à l’aide de ces moyens et l’impression que ça produit sur le lecteur.
  9. Dans la première partie du texte le narrateur (ou l’auteur lui-même ?) est là. Quel est son rôle dans le fragment ? Parlez de ses impressions, de ses sentiments.
  10. Comment introduit-il sa personnalité dans la peinture du paysage et de l’abbaye ?
  11. Est-ce que ses sentiments sont toujours exprimés directement ? Comment l’artiste exprime soi-même à travers sa peinture, son texte ?
  12. Le premier fragment conjugue une description et un mouvement ; il est en même temps stable et dynamique. Comment cela se produit-il ?
  13. A la fin de la nouvelle, après avoir raconté la légende, Maupassant nous fait de nouveau voir l’abbaye et le paysage. Comment le fait-il ? Qu’est-ce qui est changé ?
  14. Comment la description et l’action se pénètrent ?
  15. La fin de la nouvelle est donc un synthèse de deux types de textes : description (l’introduction à la légende) et action (la légende elle-même). Est-ce que vous voulez lire la nouvelle tout entière ? Lisez-la : elle n’est ni grande ni difficile et elle vous apprendra une légende amusante et certaines choses sur le caractère des paysans bas-normands qui l’ont composée.
  16. « Un autre peuple avait rêvé autrement cette bataille » – conclut Maupassant son histoire nous invitant à réfléchir des choses sérieuses. Nous vous proposons aussi de comparer cette image du Mont-Saint-Michel à celle que Maupassant a créée dans sa nouvelle Le Horla. Ça serait intéressant de voir comment le même auteur traite le même sujet restant toujours intéressant et créatif.

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