Главная страница «Первого сентября»Главная страница журнала «Французский язык»Содержание №3/2009

Les Routes de l’Histoire

L’idéal féminin

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Le XVIe siècle redéfinit les canons esthétiques : la beauté féminine s’accorde avec la bonté, la belle âme et les perfections du corps. L’esthétique physique s’étend aux bonnes manières. « L’air, la grâce, la mesure, la gentillesse, la majesté » caractérisent la beauté. La « grâce » est l’expression la plus employée. Elle traduit un charme, mais surtout « la grande modestie de l’allure et du pas, l’extrême dignité du geste et l’harmonie globale du corps »1. D’où la conséquence sur les traits : la bouche « petite, la voix douce », les gestes discrets, le rire « modéré ». Un beau sourire « ne doit montrer que cinq ou six dents, mais d’une blancheur éclatante ».

Les canons de la beauté sont rassemblés dans un paragraphe rythmé que chaque dame a en mémoire :

On distingue au XVIe siècle les parties hautes et parties basses du corps. Ainsi, les parties hautes du corps féminin doivent se voir : le buste, le visage, les mains et les yeux. Les yeux jouent un rôle décisif. Ils incarnent les astres, le soleil, le scintillement du ciel. En revanche, les cuisses et les jambes sont dissimulées sous l’habit, comme inutiles à la beauté. Ce qui justifie cette remarque de mère à fille dans un dialogue de la fin du XVIe siècle, rapporté par Marie de Ramieu : « Quel besoin de se soucier des jambes puisque ce n’est pas chose qu’il faille montrer ? »

« Embellir la face »

« À partir du XVIe siècle, la beauté féminine devient un thème d’inspiration pour les artistes.»2 On a recours à de nombreux artifices pour prolonger la beauté. Chaque grande dame a ses secrets et son trousseau comporte une batterie d’ustensiles d’argent et de porcelaine destinés à la toilette : bassin à laver les mains, bassin à laver la bouche, bassin à laver la tête, cuvette à laver les jambes. Dans un réduit près de la chambre est disposé un coffre orné de linge fin destiné à la toilette sur lequel sont disposés les accessoires de la beauté : les peignes en ivoire sculptés à larges dents et à petites dents, des ciseaux et des brosses rangées dans un étui de cuir. Sur la toilette, également, sont posés les précieux miroirs.

img2La bouche se rince avec du bon vin, les dents sont nettoyées une fois par semaine avec de la poudre de perles. Les cheveux se portent en boucles tressées, en bandeaux, ou rassemblés en compositions savantes. Les plus jolis cheveux sont couleur d’or ou de miel. Il est possible d’éclaircir les cheveux au beurre frais, suivi d’une exposition au soleil. Les rousses doivent, dans tous les cas, se teindre. Le front doigt être « grand, haut, large, blanc comme un lustre reluisant ».

Les consignes de propreté ne touchent d’ailleurs que les parties exposées à la vue. La mauvaise réputation des bains vient de ce que seules les filles légères se lavent autre chose que les mains. Le linge de corps est la grande innovation de l’époque, au point de remplacer l’eau dans les pratiques de propreté.

On prête à Catherine de Médicis l’introduction d’une pièce nouvelle de vêtement féminin. Cette nouvelle façon de monter à cheval qui fait flotter haut la jupe, oblige les grandes dames à ajouter à leur trousseau une culotte qu’on a nommé d’abord « caleçon ».

Les médecins, dans leurs traités de cosmétique, s’efforcent de retarder les effets de la vieillesse. Ambroise Paré mentionne les dents artificielles d’os d’ivoire qu’on fixe sur les dents du voisinage au moyen d’un fil d’or. Les dames prennent aussi les précautions contre l’air et le soleil ; le masque, porté le jour, devient habituel. La mode favorise cette habitude de préserver la peau, comme la volonté de dissimuler l’expression de son visage. Prospère Mérimée, romancier du XIXe siècle évoque cette coutume dans son roman Chronique du règne de Charles IX. En voilà un extrait :

La beauté de Dianne de Turgis

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Une femme d’une riche taille, montée sur une mule blanche conduite par un écuyer, et suivie de deux laquais, a attiré l’attention de Mergy ; ses habits étaient à la mode la plus nouvelle. Autant que l’on en pouvait juger, elle devait être jolie. On sait qu’à cette époque les dames ne sortaient que le visage couvert d’un masque ; le sien était de velours noir : on voyait, ou plutôt on devinait, d’après ce qui paraissait par les ouvertures des yeux, qu’elle devait avoir la peau d’une blancheur éblouissante et les yeux d’un bleu foncé. Elle a ralenti le pas de sa mule en passant devant les jeunes gens ; et même elle a semblé regarder avec quelque attention Mergy, dont la figure lui était inconnue. Sur son passage on voyait toutes les plumes des chapeaux balayer la terre, et elle inclinait la tête avec grâce pour rendre les nombreux saluts que lui adressait la foule d’admirateurs qu’elle traversait. Comme elle s’éloignait, un léger souffle de vent a soulevé le bas de sa longue robe de satin et a laissé voir, comme un éclair, un petit soulier de velours blanc et quelques pouces d’un bas de soie rose.

(d’après Prospère Mérimée, Chronique du règne de Charles IX)



1 Yvonne Kniebiehler et Christine Fouquet, Les Femmes et les médecins.

2 Henri Corneille Agrippa, De la supériorité des femmes, 1529.

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